
Descente des croix
Non pas enlevé sur un char
de feu, comme Élie,
mais en difficile descente
le corps qui pèse maintenant,
sans que l’humanité lumière ne le soutienne ,
descend et pèse maintenant du poids de l’homme,
la charpente du non-miracle quotidien,
la pitié vaine des femmes,
l’extatique indifférence de l’enfant
distrait par les broderies du linge funéraire,
il descend à tous les degrés
de la curiosité, de l’étonnement, du difforme
soupçon, de la peine momentanée ou du soin
telle l’éponge de vinaigre qui ne sécha pas la sueur,
il descend vers l’autre mère obscure,
un bras levé comme une aile blessée,
l’autre déjà abattu, déjà descendant
vers cette brume de leur être si lourd maintenant,
jusqu’au vert orphelin, jusqu’à la lumière aimée
seule sur la chemise du seul homme,
vers la pâmoison de la mère,
les boucles dorées d’un enfant,
le linge jaillissant et la fine toile
célébrant ses noces avec la terre,
vers la lumière, qui tente encore de le ravir, aidée
du tournoiement aimanté de tous les astres,
pour cette seule fois vaincue,
par l’acquiescement de cette tête à la douleur
qui sans degré aucun commence en une descente
interminable.
Poésie Cubaine 1980-2000
Bacchanales No 24